lundi 28 août 2023

L’union en politique, utopie majeure et réaliste

Ah, l'union. Utopie ultime, promesse de dépassement et de noblesse. Raison, sans doute, pour laquelle elle se fracasse si souvent, contre l'humanité, contre la politique. Et pour laquelle la politique se fracasse trop souvent contre l'union.
Le choc du calcul contre l'espoir et l'Esprit.
Après le Front populaire, l'Union de la gauche de 1972 et le Front de gauche, voilà de nouveau la gauche face à ses tentatives de hauteur et ses tentations de bassesse.
Un acronyme comme on n'en rêve pas : la Nupes.
Des actes, des hauts, des coups de griffe. On ne compte plus.
Au rang de ces derniers, des actes politiques : les intentions de listes écologiste et communiste aux élections européennes. Et un acte innommable, l' "accueil" réservé à Marie Toussaint, possible tête de liste écologiste, aux Amfis de la F.I.
L'union est une antidote au chaos. C'est un domaine â part, la construction délicate, empathique, faite d'écoute et de réciprocité, d'un assemblage social à visée de concorde. Elle ne s'arrête pas au partage du fromage électoral, elle y commence.
Des écologistes et des "Insoumis" ont voulu n'en faire qu'à leur tête. Les premiers avec leur liste (on savait bien, pour autant, qu'ils ne laisseraient pas leur échapper un pareil butin électoral récurrent), les seconds, en invitant Marie Toussaint aux Amfis pour la conspuer.
J'ai des raisons strictement personnelles de comprendre cette liste écolo, et toutes les raisons de penser qu'elle fait redescendre l'esprit unitaire au ras de l'asphalte.
Je comprends l'indignation militante, si prompte à se déchaîner en meeting, mais il appartient toujours aux invitants de soigner leurs invité(e)s, et aux dominants, même les plus légitimes, d'être exemplaires dans la domination des vindictes et passions.
Exemplarité, maître-mot d'ordre des Unions, à laquelle les participant(e)s au festin Nupes manquent avec régularité.
Encore une promesse que les lois insondables de la bétise renvoient au statut d'utopie.
Dommage.

samedi 19 août 2023

Après la déclaration de Anne-Sylvie Bameule (Actes-Sud) sur la concentration dans l'édition

 Madame Anne-Sylvie Bameule, Présidente du Directoire d'Actes-Sud, appelle à "une
régulation de l'Etat" face à la concentration de l'édition, et aux dangers et fléaux qu'elle porte.

On s'est frotté les yeux avant d'y croire, tant un tel discours était inattendu et contrevient au discours entrepreneurial courant - dans lequel le moins d'Etat possible est une constante, sauf, naturellement, demande d'éxonération de cotisations. Passons. Mais on applaudit sans réserve.
Non sans se demander, cependant, pourquoi une réaction aussi tardive (le mal est fait et remonte à loin), pourquoi la voix de Mme Bameule est, pour l'instant, si isolée dans le monde de l'édition-diffusion-distribution, pourquoi ce monde-là reste bouche-bée, tétanisé, face à des menaces qui concernent de plus en plus directement le commerce des livres lui-même mais aussi la création.

Et non sans déplorer que Mme Bameule n'ait pas joint sa signature aux 44 parlementaires nationaux et européens (tous/tous de la Nupes, il est vrai, cela suffit souvent pour détourner le regard) qui ont signé dans "Médiapart" une tribune il y a quelques semaines, allant très précisément dans le même sens.
Mais ne boudons pas notre plaisir.
Tout(e) professionnel(le) de l'édition-diffusion-distribution, tout(e) amateur/trice des livres, doit aujourd'hui ouvrir les yeux et réaliser que si il/elle ne prend pas son destin en mains, d'autres le feront à sa place. Le processus est tellement en cours que, n'ayons pas peur de le dire : il y a urgence.

samedi 25 mars 2023

Réforme des retraites, échec social-démocrate

Il aura tout essayé pour faire passer sa réforme. Mais tout a mal tourné, et il n’a plus qu’un levier pour y arriver : l’usure, la lassitude, devant l’évidence que contester coûte cher et fatigue, quand la fatigue est déjà si forte.
A moins qu’il parie sur un conflit dur, une conjonction favorable des étoiles pour l’emporter, et un écrasement de l’indignation par ce valium social qu’est la résignation.

Toujours est-il qu’au passage, la méthodologie sociale-démocrate a, d’emblée, doublement échoué.

Premier échec, lever l’ancre sans la seule force à même d’éviter à la traversée de tourner à la galère, la CFDT. Pas de chance : pour son avant-dernier congrès, une motion de refus du décalage de l’âge de départ en retraite avait valu au secrétaire général de passer près d’une mise en minorité. Il ignorait le coup de semonce, il soutenait le projet de réforme, et, pour le prochain congrès (son dernier), près de 40 ans de travail pour intégrer la CFDT dans l’économie sociale de marché européenne risquaient l’annulation.
Non seulement il n’a pas pris le risque, mais son investissement dans l’intersyndicale en a surpris plus d’un. Même s’il n’a pas pu s’empêcher, dans le même temps, depuis d’envoyer des banderilles à la CGT et à la Nupes.

Et donc, faute de soutien côté centre-gauche, on s’en alla à la pêche au centre-droit et à droite, et on connaît le résultat.

Deuxième échec, tenter la méthodologie sociale-démocrate du donnant-donnant, gagnant-gagnant : sa réforme tourne au vinaigre ? Il veut la vendre quand-même, à des syndicats ignorés jusque-là, et, promis-juré, on négocie ensuite sur tous les sujets qui fâchent : travail, partage des richesses… 
Faire avaler une pilule économique, façon louche d’huile de foie de morue, et faire miroiter un gain social en récompense : l’enfance de l’art social-démocrate.
Hélas, ça ne marche pas plus.
Le mécanisme aurait pu fonctionner s’il avait été présenté dès le début de l’opération : on aurait peut-être vu la combativité du secrétaire général de la CFDT trembler sur ses fondations, devant la possibilité que s’illumine de nouveau l’autel du compromis.
Mais, en rattrapage d’une opération de bas étage et complètement ratée, l’opération était sans crédibilité possible.

Reste le compromis social, malmené comme jamais avec ce projet de réforme : l’instrument d’une recherche de justice redistributive, avec le capital aux manettes et le travail en suiveur de bonne volonté, clef de voûte de la social-démocratie, a comme du plomb dans l’aile.





samedi 25 février 2023

Sauvons l’économie de marché (séminaire 1)

Il n'est pas excessif de souligner quels dangers immédiats guettent l'économie de marché, et les potentialités immenses de développement, et de liberté, auxquelles elle donne accès.
Les refus de réformes indispensables, la réémergence d'anarchismes contestataires de l'entreprise et de l'ordre économique, la timidité de l'ordre public censé le protéger, font craindre à court terme un retour du désordre généralisé, que des armées privées ne pourraient même contenir.

Réunis en séminaire de réflexion, nous sommes unanimement convenus de dresser un court état des dangers qui se présentent devant nous à court terme.

Ce premier séminaire (qui s'est tenu en un lieu tenu secret au début de l'année 2023) est consacré aux deux premiers thèmes de la mort assistée et d'une première alternative possible (et nécessaire) au fameux "mamouth", l'éducation nationale.

Le suivant sera consacré à l'enfance et aux retraites.
Nous sommes mus par le vibrant espoir que nos alertes sensibiliseront nos dirigeants actuels et futurs. Qu'enfin le bon sens triomphe des barbaries convenues.

Le piège de la "mort assistée"

Derrière la revendication de la mort assistée, ou volontaire, mise en avant par une « Convention citoyenne », s’en cache une autre, mortifère pour la bonne marche de l'économie : celle de soustraire au marché une tranche d’âge qui promet d’être un de ses principaux rouages dans l’avenir proche.

Un corps encore vivant qui disparaît est un manque à gagner, une déstabilisation de l’industrie du mieux-être (pharmacie et parapharmacie) et un attentat contre les établissements d’accueil pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). Le corps diminué est, pour nos forces de création économique et de compétitivité, une chance, un terrain de développement et d’éclosion qui leur revient de plein droit. Les en priver serait un mauvais signal envoyé aux investisseurs, pour la seule satisfaction d'esprits faibles et démissionnaires face aux défis du grand âge.

Nous continuerons, par ailleurs, de nous interroger quant au rétablissement de la peine de mort. Des sentences d’exécution en trop grand nombre auraient pour effet délicat de vider nos prisons d’individus plus rentables et disciplinés, dans leur activité productive pénitentiaire, que nombre d’autres en liberté. La prison est un lieu de plénitude de la valeur-travail, il serait dommageable qu’elle fût à la merci d’une application trop rigoureuse de la peine capitale.

Pour autant, si elles recevaient enfin les autorisations nécessaires, des cérémonies d’exécutions ambitieusement médiatisées, régies par des contrats voisins de ceux qui régissent les retransmissions de rencontres sportives (football…), seraient de nature à vaincre nos hésitations. On serait en présence de marchés justes, avec, d'un côté, des contenus extrêmement rentables pour leurs diffuseurs, et, de l'autre, des foules demandeuses de solutions visibles, immédiates et irréversibles, à trop de problèmes qui assaillent leur vie quotidienne, et frustrées de ces solutions depuis 1981.

                   Le salut du destin individuel et libre, contre celui de l'éducation nationale

Une autre marotte de notre société moderne est de "sauver l’éducation nationale". Pendant que l'on fantasme sur la sacro-sainte connaissance, le diplôme, la "formation de l'esprit", pendant que l'éducation nationale, qui prétend les dispenser à nos jeunes, ruine les finances publiques et n'a jamais empêché quiconque de devenir un escroc ou un agresseur de personne âgée, des secteurs aussi centraux que la restauration rapide manquent de main d’oeuvre. Les mêmes, qui pérorent contre les banlieues reléguées et le chômage qui y sévit, prétendent empêcher que s'y développent des restaurants McDonald's ou Burger King. Or ceux-ci apportent alimentation et animation aux quartiers abandonnés par l'Etat, et permettent de développer un emploi sain : un jeune embauché dans la restauration rapide reçoit une formation de qualité, que lui envient les compagnons de jeux qu'il croise dans le hall de son immeuble, et apprend l'émancipation, le bonheur du travail en équipe, et l'épanouissement au contact souriant des clients.
De surcroît, la flexibilité des temps de travail lui permet, une fois sa mission terminée, fier de sa journée de labeur, de regagner son hall d'immeuble, et de poursuivre d'autres activités commerciales de son choix.

Au même moment, sortent des écoles, grandes ou petites, des individus formatés, inaptes à occuper des postes productifs et rentables, de nature à alimenter l'économie et assurer un partenariat loyal avec un Etat réaliste, enfin respectueux de l'initiative privée. 
Coupés de la réalité économique et du peuple qui se lève tôt, ils n'ont d'abord à la bouche que les mots "salaires", "congés payés", et autres anti-valeurs du passé. Il se passe peu de temps avant qu'on les retrouve détroussant d'honnêtes voyageurs dans le métro ou grossissant les rangs des avaleurs d'allocations-chômage, le plus souvent fraudeurs. Si, comme il y a tout lieu de le craindre, nos gouvernants ne dessaisissent pas d’urgence l’Etat de prérogatives usurpées, dont l’éducation (d’incontestables progrès ont été accomplis dans cette voie), c'est une armée de robots improductifs qu'il nous reviendra d'introduire dans les cycles de production pour assurer notre compétitivité. L'immensité de la tâche requerra de sa part un effort financier considérable en faveur de nos entreprises.

                                                   --- Fin du séminaire 1 ---

vendredi 3 février 2023

Adresse à M. Jérôme Sainte-Marie

Monsieur,

Deux courts préalables .
Le premier : vous êtes très talentueux. Le deuxième : on prête à Voltaire le fameux "je ne suis pas d'accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu'à la mort pour que vous ayez le droit de le dire". La citation serait apocryphe. Peu importe. Je ne sais pas pour quelle idée je mourrai volontiers (la République, sans doute), alors autant ne pas trop s'avancer, mais, pour moi, votre liberté de vous exprimer comme bon vous semble est comme les autres, inviolable.

Passés les préalables, allons au sujet.
Vous étiez un sondeur intéressant, brillant, vous êtes toujours cela, et aussi, depuis quelques temps, un militant nationaliste, au service de Mme Le Pen. Les animateurs de télévision vous apprécient : vous défendez avec brio, calme, culture et humour, une idée qui a commis des ravages dans le paysage politique, et qui, si elle n'était pas contenue, porterait la possible agonie de la République. Vous la défendez avec tant de ce talent dont il est question plus haut, qu'à vous seul vous la faites efficacement progresser.

L'idée s'articule en trois parties : 1 - la gauche est décrédibilisée, et inopérante pour accomplir sa mission historique de défense des classes populaires, 2 - lesdites classes populaires, toujours demandeuses de défense et protection de leurs valeurs et intérêts matériels et moraux, se dérobent à la gauche et se sont tournées, et se tournent toujours, vers le R.N., dépositaire aujourd'hui de la mission de les défendre, 3 - la gauche ne peut, elle, se dérober aux classes populaires, sauf à les trahir une seconde fois (voir plus loin).
Vous ne le dites pas mais le susurrez : le R.N. ayant succédé à la gauche, elle n'a d'autre choix que de le rallier, ou, carrément, lui laisser la place.

La première des trois parties repose sur un constat réel. Vous seriez crédible en la rappelant, si, malheureusement pour vous, vous ne preniez pas au passage vos désirs pour une réalité.
C'est aujourd'hui reconnu partout, sauf par les sociaux-médiocrates endurcis : oui, la gauche française a brutalement rompu avec les classes populaires il y a 40 ans, le fossé atteignant des proportions gigantesques depuis. L'alignement socialiste sur l'Europe et la mondialisation néo-libérales d'un côté, la chute de l'URSS de l'autre, ont plus fait pour creuser un abîme entre la gauche et le Peuple que des décennies de propagande de droite. Pire : à mesure qu'elle les décimait, la gauche tentait de convaincre ses militants et électeurs que c'était pour leur bien. Le bourreau était bienveillant : constante des discours mitterrandien, rocardien, puis hollandais.
Ainsi la gauche officielle est devenue gauche libérale de marché, la gauche communiste la vouant aux gémonies, tout en négociant avec elle des places éligibles dans les communes, les départements et les régions.
Et la gauche tout entière de s'étonner de ce pied de nez qui a consisté, chez beaucoup de ses militant(e)s et électeurs (trices), à la quitter, s'enfermer dans le mutisme civique ou dans le vote nationaliste.

Vous partagez probablement ce constat.
Et en déduisez que le fruit est mûr. Devenu culturellement et politiquement hégémonique dans le Peuple, le R.N. va voir venir à lui l'ancienne gauche en lambeaux. Ainsi la gauche, disiez-vous sur le plateau de "C ce soir" jeudi soir 2 février, se ralliera, ou porterait la responsabilité d'une division de la contestation de la réforme des retraites - et de son vote au Parlement.

Vous me faites penser, Monsieur Sainte-Marie, à cette scène de "Rebecca", le film de Alfred Hitchcock (d'après Daphné du Maurier), dans laquelle la terrifiante domestique de Manderley, trop nostalgique de son ancienne patronne pour laisser la nouvelle prendre place au manoir, l'hypnotise, et tente de la faire sauter par une haute fenêtre. "Sautez, mais sautez donc, vous en avez envie, vous le voulez...".
Pas de chance : elle ne saute pas.
Par contre, la domestique, Mrs Danvers, met le feu au manoir.

Nous sommes devant un potentiel point de bascule. Le fil est tendu. L'effort déployé par vous-mêmes et les 89 robots nationalistes en costumes bleus de l'Assemblée Nationale pour annoncer l'ordre nouveau est puissant. Parallèlement et mille fois plus efficacement, la mécanique macronienne (qu'on continuera d'appeler néo-libérale, faute de mieux) continue ses ravages dans une population de plus en plus convaincue que, laissée à elle-même par un système économique et un gouvernement qui ne veulent pas d'elle, elle n'a d'autre choix que la dépression, ou la violence.

Nul ne peut savoir ce que sera la réaction populaire, quel que soit le destin de la réforme des retraites. Si nous arrivons à l'arrêter dans la rue, notre devoir continuera d'être aux côtés des victimes de ce système inégalitaire.

Notre autre devoir, Monsieur Sainte-Marie, nous qui avons la Raison chevillée au corps et à l'esprit, sera de tout faire, tout, pour soutenir ces victimes, qui seraient demain les vôtres, tout en continuant de vous combattre, tout en essayant, par tous les moyens de l'intelligence, de convaincre nos concitoyens, de toutes origines ethniques ou géographiques, régularisé(e)s ou en attente de régularisation, que vous portez au mieux une supercherie. Au mieux.

En bref, nous ne nous rallierons pas.
Mais, et là encore vous avez raison, le travail pour que la gauche ait une allure présentable auprès de ses futur(e)s mandant(e)s, à conquérir ou reconquérir, est pharaonique. Aucune illusion n'est possible. Nous avons trop peu de temps pour être nos mauvaises copies, le travail, le courage, le dépassement, l'intelligence seront les carburants vitaux, faute desquels il vaudrait mieux ne rien tenter.

Heureusement, Monsieur Sainte-Marie, vous êtes là. Au cas où il manquerait à tel(le) ou tel(le) d'entre nous la plus petite motivation, vos annonces tranquilles de l'inévitable basculement de la République vers son délitement forgent une volonté, jusques-et y compris chez le rédacteur de ces lignes, pourtant le terrain d'un doute quasi-méthodique. Je me reconnais dans la formation la plus honnie de la Nupes, qui n'est pas chaque jour une bénédiction divine pour ses militant(e)s, mais j'y suis et j'y reste. Non par attachement affectif ou aveugle, mais parce que l'extrême dureté de ces temps, et les tentations irrationnelles qui émergent chaque instant (dont le R.N. est une puissante illustration), appellent à la responsabilité de chacun(e).

Je prends la mienne, et vous adresse, Monsieur Sainte-Marie, l'expression de ma considération distinguée.




Membres

Qui êtes-vous ?

Quelqu'un qu'on sait être qui il est sans se douter qu'il est plus proche de celui qu'il n'a jamais été.